(Fr3) Des Racines et des Ailes : Le génie des bâtisseurs (2010)

Le Val de Loire, terre riche et fertile, a longtemps été un lieu de résidence et de chasse privilégié des rois de France, qui ont fait de cette région le centre du pouvoir politique, quand Paris restait capitale administrative.

Perché sur les hauteurs du fleuve, le château est emblématique de cette brillante vie de cour. Les Comtes de Blois au Moyen-âge, les Valois au XVIème siècle, puis Gaston d’Orléans au XVIIème, ont à tour de rôle marqué leur puissance dans la pierre. Le château de Blois, un exceptionnel manifeste de pouvoir et d’architecture, dont nous allons raconter la passionnante histoire !

Avec Elisabeth Latremolière, conservatrice et directrice du château, nous partons à la découverte de la partie médiévale de l’édifice. Les comtes de Blois sont alors aussi puissants que le roi de France. Ils affirment leur autorité avec la salle des Etats, où ils rendent justice. C’est l’une des plus grandes salles gothiques conservées en France. Aujourd’hui, en raison des risques d’incendie, les pompiers surveillent avec la plus grande vigilance son imposante charpente de bois.

Pierre-Gilles Giraud, adjoint à la conservation, nous raconte comment le château devient résidence royale lors de l’avènement de Louis XII, en 1498. Pour asseoir son pouvoir, le roi, très impliqué dans les guerres d’Italie, fait construire une nouvelle aile. Polychromes et ornées de son emblème (le porc-épic) les façades témoignent des premières influences architecturales italiennes.

Mais c’est avec l’aile édifiée par son successeur, François Ier, que la révolution architecturale du XVIème siècle trouve son plein épanouissement. Ce roi bâtisseur, élevé au château voisin d’Amboise, est subjugué par la Renaissance italienne qu’il va adapter au royaume de France. Les innovations se multiplient : ainsi, le magnifique escalier à vis trouvera son expression la plus aboutie non loin de là, à Chambord, l’autre château cher au cœur de François Ier…

Au XVIIème siècle, Gaston d’Orléans, celui qui voulait "être roi à la place du roi", est le dernier à marquer le château de son empreinte. Pierre-Gilles Giraud nous décrit ce conspirateur né, assoiffé de pouvoir. Intriguant contre son frère Louis XIII, il est exilé à Blois en 1634. Son frère n’ayant pas encore d’héritier, il espère être le prochain souverain. Il demande alors à l’architecte Mansart de lui dessiner une aile : elle constitue aujourd’hui l’un des chefs-d’œuvre du classicisme français, même si elle ne fut jamais terminée… La naissance de Louis XIV brisant l’enthousiasme architectural de Gaston d’Orléans…

Un roi pris dans la tourmente des guerres de religions, un roi dont l’histoire semble n’avoir retenu que les erreurs et la préciosité : Henri III, le dernier des Valois, a mauvaise réputation. C’est ce souverain mal aimé, et méconnu, dont nous allons faire la connaissance, à Blois : son château préféré.
Mathieu Mercier, historien, nous raconte les multiples facettes de ce roi dont l’histoire n’a souvent retenu qu’une légende, rose et noire à la fois.

Une légende rose, car Henri III est un homme précieux : il est considéré aujourd’hui comme le premier roi « bling bling » de l’histoire de France ! Il se brosse les dents, se lave, se parfume, se pare de perles et s’habille de soie… Il est alors la cible des ultra-catholiques menés par le duc de Guise, qui ne vont avoir de cesse que de le ridiculiser ! Cette légende est par ailleurs renforcée par la "cour de mignons" dont il s’entoure et qui lui sont dévoués : de jeunes hommes vêtus comme des princes et férus de bilboquet… Le pas est vite franchi pour en faire un roi homosexuel ! Nous verrons pourtant que rien ne vient, sérieusement, étayer cette thèse !

Mais Henri III, c’est aussi une légende noire… Son règne est en effet marqué par les duels et le sang. Avec Laurent Tixier, co-fondateur du conservatoire national d’escrime antique, nous verrons qu’en cette époque de guerres de religions tous les coups sont permis ! Le but n’est pas d’humilier, mais bien de tuer. La mort semble être la seule solution… Et c’est dans ce contexte qu’Henri III va régler son différent avec le duc de Guise… Le roi veut négocier avec les protestants, mais Guise, lui, ne veut pas en entendre parler. Il galvanise la ligue ultra-catholique et emporte Paris : Henri III est alors contraint de fuir, à Blois. C’est dans son château qu’il va faire assassiner ce duc viril et ambitieux… Un assassinat qui creuse le fossé entre le souverain et son peuple : le 1er août 1589, Henri III tombe à son tour, sous les coups de dague de Jacques Clément, un moine dominicain… Il laisse alors derrière lui une légende, rose et noire à la fois…

On connaît Versailles pour sa Cour et ses fêtes, mais on ignore que le domaine royal fut aussi un laboratoire pour les sciences de son temps. Des feux d’artifice éblouissants aux décors somptueux de la Galerie des Glaces, Versailles n’a cessé, de Louis XIV à Louis XVI, de nourrir et de célébrer la recherche. C’est ce que montre la grande exposition dédiée à cet héritage, actuellement proposée au château.

Par son ampleur, et dès sa construction, Versailles a soulevé de multiples problèmes qui ne s’étaient encore jamais posés. Ainsi, il a fallu faire appel aux astronomes pour effectuer les relevés topographiques. Le besoin de cartes pour les terres royales, autant que pour les frontières maritimes, donne naissance à l’Observatoire de Paris. Il est le plus ancien au monde à être encore en activité. Pour cette exposition, l’objet phare qu’il prête à Versailles est le miroir ardent, ancêtre des fours solaires présenté à Louis XIV…

Le château possédait aussi une ménagerie pour accueillir des animaux exotiques. Ce cabinet de curiosités en plein air a aujourd’hui disparu, mais une reconstitution en images de synthèse permet de le restituer. Son plus célèbre pensionnaire fut le rhinocéros offert à Louis XV, et qui y vécut plus de vingt ans, jusqu’à la Révolution. Le Muséum National d’Histoire Naturelle conserve ce rhinocéros, empaillé. Le Muséum garde aussi dans ses réserves les témoignages étonnants de siècles d’exploration. Sous les pas des visiteurs dorment ours, lions et autres représentants d’une faune que l’on découvrait alors…

Pour cette exposition à Versailles, le musée de la médecine prête également des instruments célèbres, dont ceux qui ont permis d’opérer la royale fistule ! Bruno Halioua, médecin et historien, nous raconte ce que les rois doivent à la médecine, et inversement ! Ainsi, l’opération réussie de Louis XIV octroie aux chirurgiens un nouveau statut : ils deviennent des praticiens médicaux à part entière.

Enfin, direction le Musée des Arts et Métiers, à Paris, où joue encore le plus prestigieux automate du XVIIIème siècle. On dit que la joueuse de tympanon fut modelée à l’image de Marie-Antoinette… Acheté par la reine, l’objet rejoint l’Académie des sciences comme un exemple de réalisation androïde de son temps. Hervé Lefèbvre, conservateur au CNAM, nous en fait découvrir en exclusivité les mécanismes cachés… D’autres objets de Versailles illustrent cette course à l’excellence, comme la prodigieuse horloge des appartements du roi : une merveille qui indique l’heure, le jour, le mois, l’année, le mouvement des planètes connues, et qui prévoit de fonctionner jusqu’en… 9999 !

A la fin du 19e siècle, des bâtisseurs de génie révolutionnent le paysage : le Grand Palais à Paris est édifié pour l’Exposition Universelle de 1900, ces pionniers donnent naissance à des joyaux de verre et de métal… Des exploits technologiques dont la Tour Eiffel qui reste l’un des plus beaux symboles…