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Eduardo Galeano, "Les Veines ouvertes de l'Amérique latine : Une contre-histoire"

Posted By: TimMa
Eduardo Galeano, "Les Veines ouvertes de l'Amérique latine : Une contre-histoire"

Eduardo Galeano, "Les Veines ouvertes de l'Amérique latine : Une contre-histoire"
Publisher: Plon | 1981 | ISBN: 2259007449 | French | EPUB | 466 pages | 2.6 Mb

Le présent ouvrage demeure, en dépit de son âge (plus de quarante ans) et de son manque d’organisation (une somme de démonstrations pas toujours bien reliées entre elles), un ouvrage intéressant au style agréable (de type journalistique, qui enchantera ceux qui n’apprécient guère l’historiographie académique). L’auteur, Eduardo Galeano, journaliste "socialiste" de renom, s’y livre à un récit assez fouillé de l’histoire du continent depuis l’invasion ibérique jusqu’aux années 1970, dans une perspective développementaliste (favorable à un développement capitaliste national au bénéfice de l’ensemble des populations latino-américaines, y compris des Indiens), étatiste (un processus dirigé par l’État même si, dans un premier temps, sa conduite par bourgeoisie industrielle nationaliste est envisagée) et anti-impérialiste (véritable trame de l’ouvrage, qui dénonce plus l’impérialisme qu’autre chose) ouverte dans sa forme comme dans son contenu (des tyrannies populistes aux communautés indigènes), du moment qu’il bénéficie aux populations. Si cette perspective est éminemment critiquable (nos options divergent complètement, puisque nous sommes anti-capitalistes et anti-étatistes) et commence à dater, il aidera sans doute l'Amérique Latine à prendre conscience de son oppression impérialiste. Mais rien de plus.

L’ouvrage met ainsi en exergue :
• L’invasion sanguinaire de l’Amérique Latine, aux motivations cupides et aux méthodes terroristes : réduction de 90 à 95 % des populations autochtones (maladies, exploitation économique, oppression politico-militaire) ; arrivée de millions d’esclaves, qui meurent également comme des mouches ; misère, exploitation et violence sans limite.
• La naissance du système colonial ibérique, fondé sur l’exploitation esclavagiste, une oppression permanente des indigènes (politiquement, socio-économiquement et culturellement) et des classes dominantes oisives et dépensières (clergé comme aristocrates) concentrant moyens de production (propriété foncière aux mains des latifundistes) et fruits de l’exploitation (essentiellement des produits miniers – argent, or, étain)
• Les conséquences économiques du système colonial, permettant une formidable accumulation de capitaux en Angleterre et en Hollande, qui contrôlent l’ensemble du commerce transatlantique (esclaves, produits coloniaux, produits de luxe destinés au faste de l’aristocratie ibérique) et en retirent l’intégralité des fruits (l’endettement énorme des cours espagnoles et portugaises conduisant celles-ci à verser l’ensemble des surplus économiques coloniaux aux créanciers anglais et hollandais). La contrepartie de cette accumulation est un sous-développement de l’Amérique Latine, privée des bénéfices de l’exploitation de ses populations opprimées, de ses sols ravagés (monoculture destructrice) et de ses richesses pillées (confiscation impérialiste d’une énorme masse de produits miniers).
• Un sous-développement résultant également d’une économie minière (or brésilien, argent de Potosi) et agricole (sucre de canne des Caraïbes et du nord-est du Brésil, caoutchouc d’Amazonie, coton, café) tournée vers l’exportation (pas d’échanges intérieurs, donc sous-développement des marchés intérieurs) à bas prix (salaires misérables et travail forcé, donc absence de demande solvable) de produits à faible valeur ajoutée (termes de l’échange défavorables et absence d’industrialisation).
• Un sous-développement savamment entretenu par l’impérialisme britannique puis américain, qui détruit systématiquement toute tentative de développement indépendant sud-américain, de José Artigas (assassiné par un régime aux soldes de l’Empire britannique pour avoir effectué une réforme agraire) à Allende (renversé par un putsch appuyé par l’Empire américain pour avoir entamé un processus de développement socialiste indépendant au Chili) en passant par Zapata (assassiné par un régime aux soldes des États-Unis pour avoir redistribué aux paysans mexicains l’ensemble des terres du Sud du Mexique) et Arbenz (renversé par un général au service des États-Unis pour avoir touché aux intérêts de l’United Fruit, multinationale américaine). On citera comme modes opératoires de l'impérialisme : assassinats de leaders politiques – trop nombreux pour être tous cités ; financement de guerres punitives, comme celle de 1865 contre l’expérience de développement indépendant paraguayenne ; invasions, comme celle de Grenade en 1965 ; soutien aux oligarchies locales, d’une docilité impressionnante envers l’impérialisme et d’un sadisme sans nom à l’égard des populations révoltées ou non; et donc abolition de toute forme de souveraineté économique des pays latino-américains, que ce soit par des pressions économiques ou politiques.
• Un sous-développement qui résulte également de l’incapacité des capitalistes nationaux à s’émanciper ; de l’imposition du libre-échange (qui détruisit l’industrie sud-américaine), alors même que l’impérialisme britannique puis américain était (et reste) protectionniste (et donc à l’abri de toute concurrence étrangère) ; des infrastructures du pays, tournées vers l’étranger, financées par l’endettement et propriété des multinationales étrangères ; des politiques destructrices du FMI, de l’AID et autres organismes au service des États-Unis.
• Un sous-développement en mutation, puisqu’on passe (à son époque) de l’absence d’industrie au développement d’industries non-nationales (et souvent privatisées) : 100 % de l’industrie automobile brésilienne était, à ce moment, détenue par des capitaux étrangers.
Conclusion (mise à jour)
Une analyse qui, certes, date un peu, mais qui reste largement d’actualité, tant l’auteur est lucide sur des questions très actuelles (pour l'anti-impérialisme, précisons : pas pour l'anticapitalisme !) comme l’endettement souverain et l’imposition des « recettes » (privatisations au rabais, blocage des salaires, industries privées nationales contraintes passant aux mains des industries étrangères suite aux mesures de déflation monétaire, ect.) du FMI.
Le premier chapitre est intitulé « LA RICHESSE DE LA TERRE ENGENDRE LA PAUVRETÉ DE L’HOMME ». Il se divise en trois parties :

« FIÈVRE DE L’OR, FIÈVRE DE L’ARGENT »
« LE ROI SUCRE ET AUTRES MONARQUES AGRICOLES »
« LES SOURCES SOUTERRAINES DU POUVOIR »


Le deuxième chapitre est intitulé « LE DÉVELOPPEMENT EST UN VOYAGE QUI COMPTE PLUS DE NAUFRAGÉS QUE DE NAVIGATEURS ».

Il se divise en deux parties :

« HISTOIRE DE LA MORT PRÉCOCE »
« LA STRUCTURE ACTUELLE DE LA SPOLIATION »


Eduardo Galeano, "Les Veines ouvertes de l'Amérique latine : Une contre-histoire"